Aller au contenu

La chambre d'Hodias

Une fois parvenue à l’étage souhaitée, la Nocturne pose la main sur une porte en bois sombre, toute simple, qui se déverrouille à son contact. Puis la jeune femme s’efface pour laisser Yule entrer.

La chambre est une minuscule pièce sombre dans laquelle deux personnes pourraient se tenir, et encore ; elle est basse de plafond, avec un plafond peint d’un beau bleu sombre décoré de motifs de constellations, et meublée de trois guéridons sur lesquels reposent des bocaux en verre. Ces derniers sont remplis de lueurs qui bougent doucement, comme au gré du vent.

Les rêves d’Hodias.

— Les propriétaires des rêves sont les seuls à pouvoir ressentir les émotions contenues à l’intérieur, explique la Nocturne. Les autres y assistent seulement. Veillez à refermer les bocaux une fois que vous avez terminé. Je serai en bas.

Elle lui sourit une dernière fois, puis s’éclipse avant de refermer la porte.

Une fois seul, Yule demeure immobile, soudain embarrassé. Va-t-il réellement regarder dans les rêves d’Hodias ? Le peut-il, alors que le vénérable Nocturne s’est arrêté il y a des siècles ? Pourtant, il a tout fait pour que quelqu’un retrouve ses secrets. Tout a été si soigneusement organisé…

Soudain décidé, Yule ouvre les trois bocaux, croyant dans un premier temps que les lueurs allaient s’en échapper, avant d’entendre des voix.

Des murmures, comme si quelqu’un se tenait tout près, et lui racontait une histoire. Il entend trois récits distincts.

Une promenade, Passage des Prunelliers. La Porte de Trois Heures est ouverte, et sur l’arche de pierre se tient un corbeau, dont le plumage se confond avec la nuit. Un morceau de ténèbres. Dans son bec, l’oiseau tient une clef. Elle brille à la lueur du lampadaire le plus proche, et il me vient à l’esprit que cette clef ouvre peut-être la porte la plus importante de la Cité de Minuit. Mais avant que j’aie le temps de demander au corbeau, celui-ci s’envole et m’échappe.

*

Une jeune Nocturne est à genoux dans un jardin, la robe bleu ciel salie par la terre qu’elle retourne de ses mains. Au portail, non loin, entouré de rosiers et de violettes, la poétesse qui vit au bout de la rue – la Rue du Silence – interpelle la jardinière, et lui demande si elle a besoin d’aide. J’entends ces mots, précisément : « si vous plantez des rimes maintenant, elles pousseront dans deux saisons et donneront des chants merveilleux ».

*

L’horlogère passe la Voie des Murmures et tourne à droite, là où elle tient son atelier. Elle y entre, un livre à la main, une enveloppe dans une autre. Elle les dépose tous les deux sur son établi, avant de retirer sa mante qu’elle suspend sur une patère. Elle a de longs cheveux noirs, un beau visage hâlé, des mains aux doigts fins, des doigts faites pour les rouages et les mouvements. Elle reprend ensuite l’enveloppe, la décachette, en sorte un morceau de papier déchiré, et le pose sur la table de travail.

*

Une fois les trois histoires achevées, Yule sent sa tête lui tourner. Un vertige, alors qu’il comprend qu’il a véritablement assisté à ces rêves : des images lui parviennent par bribes, exactement comme un songe au réveil, fugace et éphémère. Étrangement, il est aussi capable de réciter par cœur chacune des trois histoires, comme si elles s’étaient profondément gravées en lui.

Pour autant, elles ne lui permettent pas d’apprendre où est caché le secret d’Hodias. Rien dans ces mots ne lui indique le chemin, si bien qu’il doute l’espace d’une seconde ou deux, avant de se reprendre : tout est là, dans cette pièce. Il referme alors les bocaux et arpente la petite salle à la recherche d’un indice.

Un indice qu’il trouve bel et bien, inscrit sur un mur à l’encre argentée, au ras du sol ; si l’on n’y prête pas attention, l’on peut parfaitement passer à côté. Fébrile, Yule sort de sa poche le petit calepin qu’il garde toujours sur lui, s’assied en tailleur sur le sol, et entreprend, dans un premier temps, de recopier les trois rêves qu’il vient d’entendre.

— J’ai déjà vu cet alphabet, dit-il tout haut, recopiant aussi l’inscription.

Satisfait, il se relève, puis quitte la pièce, non sans un dernier regard aux constellations du plafond. Puis il dévale les escaliers. En bas, il salue la Nocturne au comptoir, qui l’invite à revenir la voir, et sort de la tour en trombe.

 

Où Yule doit-il aller à présent ?

Donner une adresse

Entrez un mot correspondant à l'adresse recherchée.

Le lieu où Hodias a caché son grimoire secret. Il s’agit d’une adresse.